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Déjà vu: l’image de la catastrophe | L’Atelier des icônes

Déjà vu: l’image de la catastrophe | L’Atelier des icônes.

On se souvient des rapprochements entre les images du 11 septembre et celles des films à grand spectacle qui semblaient en fournir la préfiguration. Quelques jours à peine après le séisme qui a frappé l’archipel nippon, on peut lire des évocations de l’imagerie populaire japonaise soulignant la troublante prescience de l’imaginaire. “Les mangas ont déjà dessiné le séisme“, écrit ainsi Laureline Karaboudjan sur son blog Des Bulles carrées.

Comme toujours dans la vérification a posteriori de prévisions ou de présages, la pertinence du diagnostic tient à la sélection des bons éléments. Une lecture plus ouverte des sources populaires suggère pourtant que la fiction, dans sa généreuse curiosité, a exploré un nombre si grand de pistes, y compris les plus improbables, qu’il est difficile de ne pas y trouver ce qu’on cherche, à condition de ne pas y regarder de trop près.

Rien ne ressemble plus à un immeuble qui s’effondre qu’un autre immeuble qui s’effondre. Rien ne distingue le fouillis de décombres causé par un tremblement de terre de celui produit par une bombe. L’idée de vouloir réintégrer un événement cataclysmique dans une série attestée participe certainement des efforts pour ramener l’exception à la règle, et atténuer le choc de l’insupportable. Mais le problème de cette comparaison, c’est qu’en croyant rapprocher les événements de leurs représentations, elle ne fait que rapprocher des images d’autres images.

Rien ne dit que les visuels sélectionnés par les JT ou par The Big Picture correspondent à l’expérience vécue par les témoins de l’événement. En revanche, ces images s’inscrivent nécessairement dans la marge étroite que dessine la gestion médiatique des catastrophes – compromis toujours malaisé entre la lisibilité et l’acceptabilité parmi le matériel disponible.

Une image ne s’installe jamais toute seule dans une séquence télévisée ou en couverture d’un magazine: elle a été choisie par des professionnels formés à la culture graphique, qui réalisent ce savant équilibre dans l’urgence en se reposant sur quelques recettes éprouvées. De même qu’il est faux de voir dans les dessins de dragons l’empreinte mystérieuse du souvenir des dinosaures, alors que c’est l’inverse qui est vrai (les figures de dragons ont servi de modèle pour se représenter les “terribles reptiles”), on peut rétablir le véritable rapport chronologique entre l’imagerie existante et le séisme: non pas celle d’une préfiguration mystérieuse, mais plutôt celle d’un référent culturel préexistant qui influe nécessairement sur la représentation de la catastrophe.

L’élément le plus intéressant que révèle cette comparaison est l’unité de l’imaginaire. En dépit des efforts théoriques pour maintenir une cloison entre vrai et faux, fait et fiction, on voit bien que la mémoire visuelle compose un curieux mélange où toutes les formes circulent et se fécondent librement. Que l’on puisse spontanément rapprocher un tableau, une bande dessinée ou un blockbuster d’un reportage ou d’une photo d’actualité en établissant une continuité entre eux est un geste plus significatif pour réfléchir à notre façon de percevoir et de construire l’histoire que le constat de quelques homologies. Pour notre malheur, la catastrophe nous surprend à chaque fois. Les images nous aident à refermer la plaie, à renouer les fils interrompus du récit – ce qui apparaît bien comme un moyen de guérir du désastre.

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